Les Journées nationales ont permis la tenue d’un grand nombre d’activités variées du 6 au 8 mai 2023, parmi lesquelles une conférence de Philippe de Chanville, vice-président du Rasso, sur l’engagement et la figure du chef, tant dans la vie scoute que dans la vie professionnelle.
En cette fraîche matinée du lundi 8 mai, les chefs et cheftaines des Guides et Scouts d’Europe, rassemblés au château de Bonnefontaine, se massent devant la scène pour écouter la conférence donnée par Philippe de Chanville. Ancien chef scout, il vient témoigner de l’impact qu’a eu dans sa vie la méthode éducative scoute, notamment dans sa vie de dirigeant – comme le scoutisme lui a appris à ‘‘cheffer’’, en somme.
Philippe de Chanville est un entrepreneur français de 43 ans. Il est le co-fondateur de ManoMano, la plateforme de commerce spécialisée dans le domaine du bricolage et du jardinage devenue une référence en la matière. Elle a intégré en 2020 le club des « licornes » françaises (une licorne est une start-up valorisée à plus d’un milliard de dollars, non côté en bourse et non filiale d’un grand groupe). Avant ça, Philippe de Chanville a été membre de l’association des Guides et Scouts d’Europe, d’abord comme louveteau, puis comme éclaireur, routier et enfin chef. Son expérience au sein du mouvement l’a profondément marqué et constitue l’un des facteurs qui l’ont poussé à se lancer dans l’aventure de l’entreprenariat.
Après 4 années infructueuses passées dans le monde de la finance, c’est dans ses années de scoutisme qu’il obtint la réponse à la question « quand vous a-t-on dit que ce que vous faites est exceptionnel ? », question qui devait lui permettre de comprendre quels étaient ses talents. Jamais durant ses 4 ans de vie professionnelle n’avait-on qualifié son travail d’exceptionnel ; au contraire, combien de fois avait-il entendu ces mots provenant de ses pairs ou des parents des jeunes scouts qui lui étaient confiés du temps de son service de chef ? Loin des tâches automatiques de la finance, loin de ce milieu aseptisé où tout risque est systématiquement réduit au minimum, où l’initiative est tuée par l’esprit de mimétisme, Philippe de Chanville s’exprime réellement lorsqu’il se montre aventureux, lorsqu’il peut prendre l’initiative, lorsque ses talents de chefs peuvent pleinement s’exprimer … autant de choses qu’il cultivât étant chef au sein des Guides et Scouts d’Europe, et que son passage à la vie professionnelle lui avait fait oublier.
« Le routier scout ne s’accommode pas d’un monde truqué où les tricheurs sont rois »
Selon lui, si on fait un métier qui ne repose pas sur l’utilisation de nos talents, « on finit avec un post-it sur le front marqué ‘‘nul, médiocre, pas bon’’. Mais la même personne, sans rien y changer, qui serait dans un environnement avec ses propres talents, adaptée à sa juste place, peut faire des choses incroyables » continue-t-il. C’est ce qui lui était arrivé : il avait mis le doigt dans un engrenage infernal qui l’avait entraîné dans une spirale de négativité. Tout arrêter pour se lancer dans l’entreprenariat – un milieu privilégiant l’initiative, la prise de risque, et l’esprit de commandement – a été pour lui la solution. Étant profondément catholique, il ne s’agissait pas uniquement pour Philippe de Chanville de créer une entreprise destinée à lui profiter matériellement et psychiquement, car « Le routier-scout ne s’accommode pas d’un monde truqué où les tricheurs sont rois, et, honnêtement, tout ce théâtre social, toute cette comédie ne favorise pas l’alignement, l’être en profondeur, être en vérité avec soi-même ». C’est pour cette raison que tous les employés de ManoMano n’ont pas été choisis uniquement pour leur savoir-faire, mais également pour leur savoir-être, leur souci d’être à la « bonne place ». « En mettant cette vérité au cœur de notre culture de management, nous avons pu attirer des profils incroyables qui ont fait le succès et le développement de l’entreprise ».
En effet, trouver sa place en faisant fructifier ses talents n’est pas une fin en soi pour Philippe de Chanville. La méthode scoute qu’il a repris dans son entreprise vise plus haut que sa simple satisfaction psychologique et celle de ses employés : il s’agit pour lui d’« établir le règne du Christ dans [notre] vie et dans le monde qui [nous] entoure ». L’entreprise devient ainsi, par l’exemple, un lieu d’évangélisation. Cette logique est prépondérante dans la pensée de Philippe Chanville puisqu’il constitue en vérité le cœur de la vie chrétienne : la sanctification. De fait, l’entrepreneur catholique en est persuadé : « [le Christ nous demandera à tous, un jour] : Je t’ai fait connaître les joies du camp et de la nature qui répondent aux besoins fondamentaux de chaque homme et de chaque femme ; avec qui as-tu partagé cette découverte ? […] Je t’ai montré que, quand tu étais dans la souffrance, dans la douleur ou le désespoir, j’étais là et je te portais ; avec qui as-tu partagé cela ? Je me suis donné à toi dans tes camps, avec la messe, avec l’adoration et la confession ; avec lesquels de tes amis qui ne me connaissent pas as-tu partagé cette vérité ? ».
Philippe de Chanville conclut son intervention devant les chefs et cheftaines des Guides et Scouts d’Europe : « Allez, car vous faites le plus beau métier du monde ! […] Vous donnez à chacun de ces jeunes la plus belle chance de leur vie ». Après une telle démonstration, qui pourrait encore en douter ?
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